Animal de Sandrine Collette
Coup de ♥♥♥♥♥ du traqueur
Alors qu’elle s’enfonce dans la forêt, Mara, une jeune veuve népalaise, découvre avec stupeur un très jeune enfant ligoté à un arbre.
D’abord interdite, elle le libère et le prend avec elle.
Elle y retourne la nuit suivante. Stupéfaite, elle découvre la même situation. Un autre enfant est attaché. Elle le libère de ses liens et fuit avec lui dans la nuit moite.
Un garçon, et une fille !
Consciente qu’elle vient de déranger quelque chose qui la dépasse, elle quitte son misérable chez elle des montagnes et se rend en ville pour se faire oublier.
La vie y est épuisante. Ils manquent de tout. Les enfants, bien qu’inscrits à l’école, n’y vont pas. À la place, ils récupèrent tout ce qu’ils peuvent dans les décharges à ciel ouvert.
Ils trouvent toujours quelque chose pour manger et à voler.
Mara tente de survivre dans cet enfer urbain. Les enfants vivent de rapines. Ils forment un duo violent.
Pour les sauver, Mara doit les séparer. Laisser à l’un, au moins, la possibilité d’avoir une vraie vie.
20 ans ont passé, au beau milieu des forêts et des volcans de la région du Kamtchatka, une chasse est organisée.
Ce n’est pas une simple chasse. Les hommes et femmes présents sont des prédateurs habitués à traquer des animaux aux quatre coins du monde.
Ils sont venus pour l’ours.
Chacun aura le sien.
En attendant, ils se remplissent la panse et fourbissent leurs armes.
L’air est saturé d’odeurs riches d’essences d’arbres et de gibiers.
Là, des traces d’ours qui traversent leur piste.
Leur guide est un taiseux. Il devine que ce groupe est particulier.
Certains des chasseurs aiment un peu trop le sang et sont prêts à toutes les folies pour y plonger leurs mains.
Lior est une jeune femme pleine de vie. Elle se transforme en autre chose quand elle prend la trace du gibier. Elle a l’instinct. Celui qui remonte du fond des âges.
Elle devient traqueuse (comme moi).
Elle poursuit sa proie sur des terrains aussi difficiles que dangereux. Infatigable, elle ne lâche rien, quitte à se mettre en danger.
Hadrien, son mari, la connaît.
Il ignore pourquoi elle est comme cela, mais cet état fait partie d’elle.
Il l’aime comme elle est.
Il la suit dans toutes ses chasses et l’observe se transformer en quelque chose d’autre.
Pendant ces moments, elle devient la quintessence d’une traqueuse.
Elle se met dans les pas de sa proie qu’elle ne lâche qu’à la mise à mort.
Elle mue, toujours Lior, mais pas que, elle devient une autre.
Quelque chose qui surgit de son passé et lui fait briller les yeux d’une lueur étrange et inquiétante.
L’ours se sait suivi.
Cette fois, il décide de ne pas agir comme à l’accoutumée.
Il connaît les petits animaux qui le suivent.
Il connaît leurs pratiques.
Si ce n’est ce qu’ils utilisent pour tuer son espèce et tant d’autres, ils sont si fragiles.
Face à sa puissance, ils ne sont rien.
Il décide de renverser les rôles.
Avis du traqueur :
Les romans de Sandrine Collette ne sont jamais simples.
Comme je l’ai déjà écrit et dit lors de précédentes chroniques concernant ses romans: on en ressort de ces livres pleins de bleus.
L’auteure se sert des corps, mais plus généralement de chaque muscle, os et autres ligaments qui nous permettent d’avancer.
Dans ce roman, elle joue beaucoup des paysages superbes et des odeurs puissantes qui entourent les protagonistes.
On passe des montagnes presque vides, à des villes saturées d’humains.
Elles débordent de tout ce que nous sécrétons.
Nous voilà dans une forêt montagneuse.
Des arbres et des buissons qui cachent notre plus grand prédateur.
On est confronté à la dualité de l’homme et de l’animal. Celui qui tue pour manger et celui qui tue pour survivre et se venger.
Quand l’homme n’a presque rien, mais fera tout pour garder ce qui lui reste.
Tout au long de ce livre, mon air ambiant a été saturé d’odeurs puissantes et de bruits plus ou moins étouffés. Comme un murmure qui ne s’arrête jamais.
Le froid mordant de la montagne, la chaleur nauséabonde d’une ville surpeuplée où chacun vit les uns sur les autres. Et cette forêt pleine de dangers dès que la nuit tombe.
Quand sort le prédateur silencieux et magnifique.
Il emporte les hommes, femmes et enfants sans distinction.
Une tension écrasante qui nous verrouille dès la première ligne et ne nous lâche qu’à la toute fin.
Une fin qui surprend et interpelle.
Sandrine Collette nous plonge dans la peau de personnages qui nous interpellent.
Des psychologies de personnages parfaitement développées.
Elle construit petit à petit la psyché de tous les individus et nous les fait découvrir par fragments et flash-back.
On passe par tous les états. Une tension qui monte très haut et qui descend par moments pour nous entraîner à la limite de l’esprit et de ce qu’il est capable d’encaisser.
Un roman Coup de ♥♥♥♥♥ du traqueur
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Un roman à dévorer comme des chouquettes.